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Pendant ce temps, ailleurs...

Photo du rédacteur: Melanie Frerichs-CigliMelanie Frerichs-Cigli

Je sais, je devrais vous écrire plus souvent. Rassurez-vous, j’ai une bonne nouvelle : je prends cet été (hémisphère nord, c’est à dire juillet-août) pour m’équiper, me former, démarrer, et dès septembre, je me lance dans une chaîne YouTube, un podcast et aussi, parce que c’est mon mode d’expression premier, le plus naturel, finalement, un bouquin.


J’ai la chance d’avoir trouvé un mécène, selon une formule très intéressante, d’ailleurs, dont je vous reparlerai prochainement, donc je vais pouvoir m’y consacrer pleinement (Merci, merci à l’univers et à tout ce qui existe pour cette chance!!!).


Dans l’intervalle, n’allez pas croire que je ne fasse rien, loin de là. Je me plonge dans l’analyse fastidieuse et obscure de tout un tas de trucs passionnants sur les 20 dernières années, comme le transport de pétrole, la régulation des monnaies, l’évolution des droits personnels, etc. C’est fascinant, ça permet de comprendre un peu mieux les enjeux actuels et c’est donc nécessaire, mais ça prend un temps fou.


En attendant, j’aimerai vous faire part d’une réflexion qui m’est venue ces derniers jours, à vivre ici, au Costa Rica. C’est que voyez-vous, on a les mêmes problèmes : droits remis en cause, crise économique grave, migrants mal perçus, crise des valeurs, etc. Mais on n’y apporte pas les mêmes réponses.


Ainsi, dimanche dernier s’est tenue la Marche de la Diversité (ben oui, c’est le mois de la diversité partout)… Mais ici, ça n’a rien de la cage aux folles, c’est familial, festif ; le gouvernement, les grandes entreprises défilent et puis il s’agit de toutes les diversités : sexuelles, bien sûr, mais aussi ethniques et religieuses. Beaucoup de familles, beaucoup de conseils de bon-sens comme : portez des tenues et des chaussures confortables et pensez à vous hydrater, beaucoup d’ambiance mais pas de désordre. Pas un papier ou un confetti laissé par terre sur le trajet de la Marche, par exemple, et au final, rien de choquant même en pays très catholique, conservateur et pas particulièrement friant des démonstrations d’affections quelles qu’elles soient en public. Les plus homophobes tombent d’accord pour dire que chacun fait ce qu’il veut librement - même si eux n’approuvent pas, mais pas dans l’espace public, couples hétéros compris. Et c’est là l’expression la plus claire du rejet et de la désapprobation sociale sur ce sujet. Passez votre chemin, fauteurs de troubles, les gens veulent la paix.


Cependant, il y a des troubles et pas mal de manips, ici aussi. Tenez, il y a quelques jours, les pêcheurs en manifestation ont envahi le Palais Présidentiel, avec violence et même pour certains armés de pierre et de dynamite (un coktail molotov a même été lancé dans la soirée contre le Parlement). La raison invoquée à la base était l’application, à partir de juillet, d’une TVA de 13 et quelques %. La police est bien évidemment intervenue, elle a sorti les manifestants assez violemment, d’ailleurs… Et les a laissé partir, sur ordre express du Président, qui, pendant ce temps-là, a fait un live Facebook, pour expliquer que le Costa Rica était un pays démocratique et pacifique, que ces débordements de violence étaient tout à fait contraires aux valeurs du pays et qu’il ne répondrait pas à la provocation, seulement au dialogue. Fin de l’épisode : 1 à 0 pour le Président, qui bat quiconque voulait utiliser la colère d’une caste professionnelle pour provoquer des troubles.


Néanmoins, 2 jours plus tard, les manifestations recommencent. Nouveau live Facebook : j’entends l’inquiétude populaire, moratoire sur l’application de la loi durant 3 mois, le temps de discuter. 1 à 1 pour les manifestants (qui ont eu ce qu’ils voulaient) ET pour le Président (qui aurait des leçons de démocratie à donner au monde entier).

Pendant ce temps-là (quand je vous dis qu’ici aussi, ça bouge), les collégiens et lycéens protestent également et demandent la démission du ministre de l’éducation, dont la réforme lèserait 2 % des élèves pour qui l’accès à l’école est un peu plus difficile, avec des temps de trajet en bus dépassant une heure. Bam ! Live Facebook du ministre, invitation des représentants des élèves à une réunion avec le président et le cabinet ministériel, après formation expresse à la prise de parole politique par des syndicalistes. La réunion est diffusée, elle aussi, en live Facebook, avec en commentaire, notre jeunesse est essentielle pour nous, nous avons à coeur de vous écouter et répondre à vos besoins… Pour 2 % d’élèves ayant des trajets de bus un peu long ! (Mais y’a toujours des bus, toujours des écoles, toujours des enseignants…). Tout ça s’est terminé par une conférence de presse du Président, avec les élèves derrière.


Oui, quand il s’agit de leurs droits, les gens sont facilement mécontents, ici. Facilement dans la rue, facilement mobilisables mais on leur répond ! Au résultat, y’a des riches, y’a des pauvres, y’a des très pauvres… Mais tout le monde est éduqué, soigné… Et même les débats ont une tenue qu’on ne trouve plus beaucoup. Les insultes sur les réseaux sont feutrées : Signor Presidente, usted esta un ladron, est probablement l’expression d’un ras-le-bol confinant à la rage, car c’est presque le pire que l’on lise. Et tout à l’avenant, la vie est douce, ici, facile, digne.


Ici aussi, libéralisme oblige, la médecine est à plusieurs vitesses, mais personne n’en crève ! Au contraire, il y a une offre pour chaque besoin : la publique, gratuite pour tous en urgence, sécurité sociale pas chère et qui couvre tout et tout bien fait MAIS faut attendre, parfois longtemps avant d’avoir un rendez-vous ; la payante à l’américaine pour les riches, avec des menus check-up chers et efficaces ET très rapides ; et enfin, la médecine pour la classe moyenne, faite par des Fondations privées, des sortes de réseaux de médecins qui gagnent leur vie, payent leurs frais, mais prodiguent des soins à tarifs hyper modérés, rapides et de bonne qualité. Personne n’est lésé, personne n’est laissé pour mort, tout le monde est sûr, quoiqu’il arrive, d’être soigné dans de bonnes conditions et fonction de ses moyens.


Pendant ce temps-là, ailleurs, on tabasse les manifestants et les mutilés commencent à se compter sur plus que les doigts des mains qu’ils n’ont plus.

Ailleurs, les urgentistes, les infirmières, les ambulanciers, les aides-soignantes en EHPAD n’en peuvent plus de se suicider au fur et à mesure qu’on comptabilise le nombre de soins mécaniques qu’ils sont capables de facturer dans l’heure.

Ailleurs, les caïds et les moqqadems menacent et parfois sanctionnent injustement les parents des étudiants grévistes, pendant qu’on condamne un médecin des pauvres qui voulait soigner des enfants en dépit de sa hiérarchie.


Ailleurs, les choses dégénèrent… Mais pas parce que les conditions sont mauvaises, elles le sont partout. Elles dégénèrent parce que nous n’y faisons pas face de la bonne manière.

Pura Vida !

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